Confusion de crépuscules

Etre appelé par la nuit
Sous la fenêtre de l’hiver
Regarder
Dans le vide
Un chien
Seul
Mouillé d’ennui
Passer en courant
Après la pluie
Après le temps .
Connaît-il un abri
Où l’âme
Le corps
Le désir
Peuvent se réchauffer
Eclore
Grandir?
Sous la pluie
L’espoir
Le suit .
L’expérience de la solitude
Des nuits veuves
Aux confidences de l’inutile
Pourra-t-elle briser la certitude
Qu’elles ne finiront jamais
Et deviendront
Aussi
Habitude?
Là-haut
Quelque part
Les mers ont soif de printemps .
Elles chantent à tue-tête
Jusqu’aux yeux de la lande
Pour oublier la peur
Le froid
L’eau couleur de tempête .
Sur mes genoux
Tremble le froid des mains vides .
Mes hanches n’arrivent pas à chanter .
L’argile de la peur
Habille les os de mon âme .
Sous la fenêtre de l’hiver
Derrière le mur des lunes fanées
– Qui ont cherché
Si longtemps
D’autres lunes
Pour jouer ensemble
Dans nos regards
Nos vergers
Remplis de lunes –
Il y a confusion d’aubes
De crépuscules
Autour du berceau du songe
Accroché aux arbres
Anxieux
Nus
A la portée de la main du vent
Qui le berce
L’endort
En écoutant pleurer la neige qui fond
Sur le visage du Nord .
Ecouter
Assis sur les marches des éoliennes
Les caresses des bouleaux
Regroupés sur les collines
Qui s’enlacent
Lient leurs racines
Se cherchent
Dans la chaleur secrète
Du désir qui veille
Et sentir
Entendre
Monter leur sang dans nos veines
Sève de visions
De couleurs toutes neuves
Et les voir se serrer
Se perdre
Dans l’étreinte du chant qui va venir
Qui vient
Qui grandit chaque jour
Blotti dans le désir des silences
Annoncé par les oiseaux
Par les loups qui courent ensemble
Sur les foulées de la lumière qui avance .
Il y a une odeur d’herbe
Toute proche
Suspendue aux volets de nos hivers
Qui enfin se taisent .
Des scies bleuies par le gel et le vent
Chantent dans les pins .
Des arbres tombent .
Fais attention aux ravins des saisons mortes .
Tu me montreras ton arbre favori
L’arbre sans temps
Où nichent les pics-verts
Rires du printemps .
Alors adossés au mur des caresses
A l’espoir apaisé
Nous pourrons regarder s’ouvrir
Les mains au vert fragile des figuiers .

Avril 1998