Nous serons voyage

à Giovanni

Je vois une forêt au fond du voyage.
La lumière est calme dans ton regard.
Il y a sûrement un chemin vers ton visage.
S’il le faut je serai arbre qui marche
Malgré le doute du silence
Les pas qui titubent
Le manque d’orages.
Dans le sourire du soir
Je sens la présence d’une clairière.
Elle est quelque part
Vaste
Protégée
Habitée par le vent
Par les matins immenses
Les couchants interminables
Confins du jour qui parle de certitudes
De promesses
De rendez-vous
De nos mains
Où le désir est caresse
De nos lèvres
Entrouvertes
Où fleurit la parole
Clé de tendresses.
La clairière était au cour de l’attente.
Je l’ai trouvée au bout de la nuit
Guidé par les appels
Si doux
Des étoiles filantes.
La lune s’est mise alors à monter
A mûrir
Sur nos arbres qui avancent
Se rencontrent
Se regardent
S’étreignent de leurs branches.
Derrière le mur
Vert
Mobile
Indécis
Peut-être trop sûr,
Delà les sources
Cachées
Dans les pénombres du désir
S’accumulent déjà les nuages.
Ils s’en vont au loin
Vers l’estuaire du jour
Là-bas
Où l’amour
Annoncé
Devient présence d’orages.
Alors nous ne craindrons plus l’aurore
Les pièges de son visage
Ni le chant des sirènes
Ni l’appel des Ithaques.
Nous aurons des pins
Droits
Bien taillés
Pour l’oil du cyclope.
Sur la route de l’été
Ensemble
…Nous serons voyage.

Mai 1993