Paroles d’eau

En rentrant
Seul
De chez un espoir
Un vieil ami d’enfance
Perdu de vue
Depuis longtemps
Derrière un miroir
Alors qu’il fréquentait
Epris
Eperdu
Le secret des masques
Je me suis arrêté
Hier soir
Enfin nu
De tant d’aurores
Place du silence
Sous le réverbère de la nuit
Ecouter
L’eau
Lire mes visions
Flux infini
Au pouvoir des mots
Ecrire
A geste d’encre
Sonore
La vie
Légendes de fontaines
Paroles de pluies
L’aventure du vent de mer
Sa course en vagues blanches
Vécue
Sur la ligne
Toujours lointaine
Si inconnue
Du songe
Vaste horizon
Attendu
Couleur du désir
Où le ciel s’y plonge ….

Près du lavoir
Aux caresses
Aux senteurs d’oiseaux
Où l’eau se lave
Des couleurs mortes
Des visages perdus
Du silence
Violé par le feu
Dans les marais
Parmi les roseaux
Aux nids de cendre
J’ai attendu la pleine lune
Pour voir les ormeaux
Mes arbres aux attentes
Se baigner en secret
Avec les nuits d’été
Bercés par le chant
Inaudible
le vol planant
Des martinets qui s’endorment
Là-haut
Portés par le songe
Repus d’étoiles
D’eaux si calmes
Bues au couchant
Sur le fleuve
Si lisse
Chaud
Sans blessures
Le chemin des clartés
Suspendu à la nuit
Nu d’explications inutiles
Voie si tendre
Aux eaux lactées…
Sous le sourire
Errant
De la nuit
Réverbère des voiliers
Qui se sont quittés
Perdus
Sur les brisants des larmes
Je regarde
Emu
Place du silence
Ceux qui se sont assis
S’assoient
Depuis si longtemps
Sur la rive aux fables
A attendre
Inutiles
Que toute l’eau du monde passe
Pour passer
Enfin
Sur (autre rive
La rive aux présences
La grève sans larmes
Si loin des passeurs
Des ponts de l’enfance
Mais personne n’est jamais passé
Ni ne passe
L’eau seule s’en va
Sous les ponts du présent
Toujours jeune
Toujours différente
Eux sont toujours là
Assis
Inutiles
A attendre…

Au bout de la nuit
Place des inutiles
Des yeux sans regard
Où s’ouvre la route d’eau
L’eau du voyage
Où partent les vaisseaux
Chargés d’espoirs
Aux voiles infinies
Tissées de vent
De nuages
j’entends courir
Haletants
Légers
Les mendiants d’amour
Ailes de sève
D’écume
De lave
Sur les pavés liquides
Du corps
Du désir
Caresses d’eau
Sève d’âme
Course éperdue
A la recherche d’un gué
Où guéent les oiseaux
Qui migrent vers le songe
Où les amandiers
Arbres d’eau
Aux pétales de vent
Fleurissent toujours
En toute saison
Delà les nuits des murs
Aveugles de champs
Muets de désirs
Aux maigres orties
Du temps…

Sur la route d’eau
Avec ma lampe d’amour
Allumée d’oiseaux
De matins
Je pars avec le vent

Par un printemps
Inconnu
Sans temps…

Février – mars 1991 – 15 mars 1991