L’écluse

Avec les cerfs-volants attachés à la main du songe
Les oiseaux-nuages dans les rets du couchant
Je descends les eaux du fleuve
Sur le radeau du désir
Au mât d’espoirs
Et une petite voile blanchie par le vent.
Corsaire des étoiles
Aux voies de mer
Connues par le sel des marées et les pleines lunes
Je m’en vais
Lucide
Toujours enfant
Vers l’écluse
Sûre
Aux portes closes
Où frappent les silences de l’âme
Hantés par l’aube.

Tous les fleuves connaissent la route de l’écluse.
Ils sont les eaux du Grand Fleuve.
Entre deux vagues d’infini
Le temps y poursuit l’éternité
Et la mort y a un sourire de vie.
Mon regard est prisonnier des rives
Les rives sans nom
Appelées avec des noms à la dérive
Patries inutiles
Terres d’habitude
Clos d’arbres stériles
Sans feuilles
Où la liberté pleure
Derrière les haies du fini
La vie qui se meurt.

Les cerfs-volants attachés à la main du songe
Me donneront la clé de l’écluse.
L’océan
Sans rives
Viendra à ma rencontre.
J’en serai ivre.
Tous les noms et les visages
Arc-en-ciel du possible
S’en iront avec le vent
Les oiseaux-nuages.
Tout ne sera qu’un
Sur la ligne de l’horizon
Où écrit le matin.

Novembre 1996