Troncs d’arbres-âmes à la dérive

Troncs d’arbres-âmes à la dérive sur la mer-fleuve-vie dans les baies écartées où même le vent s’est perdu dans sa course qu’il croyait infinie.
S’est-il caché derrière le dernier bouleau encore debout où fleurit au printemps sur la lande un nid d’oiseau ?
Tu le sauras au bout de l’inconnu des plaines où le fini parle à l’infini tant attendu.
Préviens-moi quand tu l’auras aperçu.

Dérive du soleil-regard sur le désir-midi à travers les nuages qui violent la mort et la peur au seuil d’un verre de vin, d’une cigarette éteinte où les illusions ne comptent plus les amours perdues.
Tes pieds se sont pris dans l’asphalte de l’habitude, celle que l’on confond avec l’ennui.
Ne crains pas la nuit. Elle t’apprendra la solitude acceptée dans les champs oubliés où tombent les lunes de ceux qui aiment et ne sont pas aimés.

Dérive de la cruauté de l’enfance où la passion s’habille de chagrin et d’abandon.
Mais tu le sais, il n’est jamais trop tard pour la douceur des voluptés, malgré les mers profanées par la blessure des montagnes dans les bras d’espoirs trompés.

Dérive des pleurs-emportements-excès de la jeunesse qui veut refaire le monde et court et tombe dans la boue d’idéaux morts-nés.
Le refait-on ou nous refait-il au fil de l’eau qui passe et s’en va sans garder le souvenir de la mort dans la vie, de la vie dans la mort où il faudra s’arrêter avec sa soif d’infini ?
La vie-la mort les as-tu rencontrées ? T’ont-elles reconnu ? Quelle chance tu as eue et tu ne le sais même pas, car elles seules ne mentent pas.

Dérive des mains-songes de toute âme et tout corps dans ce qu’il n’ont pas su être et accepter.
Ils planent avec le soleil et tressaillent avec le sentier, celui où tu voulais m’apprendre à marcher.
Embrasse-moi de ton sourire et laisse-moi dériver.

Septembre 1999