Il y aura toujours un puits pour mon âme

 

                                                                 à ceux qui sont sur les chemins

 

Sur la ligne
Immobile
De la fin du printemps
Les papillons du couchant dansent les genêts qui se fanent .
Pétales d’ailes qui s’illuminent de chemins .
Le soir ne veut pas mourir .
Dans les yeux des mendiants
Perdus
Le désert se réjouit d’oasis
Le vent ramène de loin
Très loin
La soif des dromadaires
Qui blatèrent avec le sable courant au gré des dunes .
La liberté du vent
Leur donnera un chemin nouveau
Où les éperviers
Depuis toujours
Chassent et déchirent l’immobile et l’habitude .
Les réponses des chemins parcourus sont inutiles .
Le désert n’a pas peur de partir .
Il sait qu’il ne sera jamais trop loin
Pour revenir .
Dans son infini
Il y aura toujours un puits pour la soif
Les étoiles
Le plaisir .

Là-bas
– Ou est-ce nulle part ? –
Sont enfouis les instants-regrets
Amours possibles
Jamais écloses .
Sur les sentiers de l’âme
Où il y a toujours quelqu’un
… Qui attend quelqu’un
Qui a soif de ses désirs
Qui voudrait se perdre dans ses mains
Je suis parti à la recherche du désert et du vent .
Je les ai rencontrés au matin
Très tôt
Près d’un puits .
Le désert était déjà dans la caresse du vent .
J’en ai fait mes amis .
Ils n’ont pas les yeux habitués à voir
Les yeux qui ne voient plus rien .
Ils ont le regard et le rire du silence
Où le vide se remplit de visions
De départs
De retours
Où l’amour voyage
Avec les dattiers et les dunes
Mendiant delà les mirages
L’ombre des plénitudes .

Sur les terrasses de l’invisible
Les moineaux du désert
Chantent une maison oubliée
Devenue voix du vent
Où l’écho et ses errances
Ne savent plus où s’arrête la réponse de l’amour
Ni la question du désir qui avance .
Pour voir mon sourire
Et les larmes émues de mon regard
Le désert et le vent s’assoient au bord des oueds taris
Et inventent
Pour ma soif
Des histoires de pluies
D’herbes gorgées de sève et d’ombre
Où se pose
Les nuits d’été
La rosée des songes .
Près du puits aux questions
Où se désaltèrent le désert et le vent
Les visions et la galaxie
L’attente des orages
J’ai ouvert les mains de mes amis
Pour y déposer les présents du voyage .

Les branches des dattiers et les dunes
Que le vent déplace au gré de son âme
Se sont remplies
Soudain
Du sourire des orchidées les plus rares
De l’appel de l’océan
Qui crie dans les conques ses légendes
Du bleu des pétrels
Qui bravent les mers du matin
Et l’inconnu des mirages
De l’envol des carpes
Mûries en dragons
Sur les fleuves sereins et l’or vert des rizières
Des traces du lièvre qui fuit sur la neige
Et du rouge de son sang
Versé pour la soif du bien-aimé
Sur les chemins du désir
Parcourus par l’été .

Le soir ne veut pas mourir .
Il y aura toujours un puits pour mon âme .
Je serai désert .
Je serai vent .
Je serai chemin pour l’amour qui attend .

Juin 1997