Rencontre

à Ridha de Nefta

Dans la steppe
L’infini ne sait plus où aller.
Les haies de figuiers de barbarie
Poursuivent
Interminables
Inlassables
Le DÉSERT
Son sable
Qui court les chemins du vent
Indifférent aux frontières inutiles
Instables.
Il est si libre
Si vaste.
Mais quand s’arrêteront-elles
Ces branches d’épines
Fleuries de vert opaque
Barbelés si flasques… ?
Delà leur regard aveugle
Le soleil est cri mourant de soif.
Les gestes des enfants nomades
Parlent de solitude
Devenue mémoire
Immobile
Drap si dru d’habitude
Déchiré
Un instant
Par ma présence
Qui passe
Sur la route du voyage
Escortée de silence.

Aux portes du soir
Où s’arrêtent
Enfin
Les haies
De tant de passés
Fragiles
Blessés
J’ai vu le DÉSERT venir à ma rencontre
Vêtu de brocarts de sable
Trempé d’ocre et de mirages
Où le vent écrit l’éphémère
Sur l’absolu de l’immense.
Je regarde le soleil
Seul amer’
Lointain
Du tout
Du rien
Plonger dans les dunes
– Lenteur insoutenable –
Corps-horizon
Mouvant
Où je perds
Inquiet
Les confins du présent
Happé
Soudain’
Par l’étreinte totale
Le baiser enivrant
De l’infini ouvert
Etendue sans porte
Sans clé
Sans partout
Sans nulle part.
À l’orée de ses yeux
Oasis profondes
Intensité verte
Sans temps
Le DÉSERT m’a donné ton visage
M’a souri avec ton regard
– Brûlure espérée –
Cueilli sur les promesses de tes lèvres
Qui fleurent toujours les roses de Nefta.
Ensemble nous sommes partis
Dans le sommeil du désert
Sous les branches de la nuit
Si basses
Mûres d’étoiles
Pour nos mains tendues.
Nous avons marché avec le silence
Jusqu’au baiser du songe
Où les lèvres de l’amour sont nues de mirages.

Qu’il est doux
Soudain
Dans mon sang
Le chant de la huppe
Entendu à midi
Dans les jardins de Carthage.

Juin 1993